Paris, le 27 novembre 2024. Une journée comme les autres, et pourtant pas comme les autres.
Midi. Je suis au "47", ce lieu si spécial qui rassemble une belle communauté d'acteurs et d'entrepreneurs engagés.
"Faire de l'amour une stratégie" : c'est la phrase qui retient particulièrement mon attention au cours de l'échange à cœurs ouverts que nous avons Jean-Pierre Goux, mathématicien et auteur. Je me dis que non, l'amour, ce n'est pas le concept nunuche que notre société en a fait. L'amour c'est parler, faire, vivre avec le cœur.
Un magnifique moment de reliance que ce déjeuner autour du livre "La Petite Princesse" de Jean-Pierre.
15h. L'échange se poursuit de façon plus informelle (si tant est qu'il ait été "formel" à un moment donné). Je suis marquée par une discussion autour de la difficulté de vivre de son engagement, de sa passion. Des compromis que notre société nous demande, qui tournent souvent à la compromission de soi. Comment être à sa place, vibrer ce que l'on est, être dans le cœur, quand nous nous sentons contraints de faire des choix "raisonnables" pour gagner notre vie?
17h, je sors du 47. Dans la rue un homme m'aborde, me demande comment je vais, puis me demande si je peux retirer de l'argent et lui donner. Je suis polie mais m'éloigne, parce que je me sens un peu pressurisée et que mon mental me rappelle que je n'ai pas vraiment de revenus stables en ce moment. Il me supplie. Je me retourne et lui donne 1 euro. Il me demande un billet, je m'éloigne.
Et là je suis frappée par une grande émotion. Nous venons littéralement de parler de la nécessité de vivre depuis l'espace du cœur et je viens de refuser de donner un billet de 10 euros à quelqu'un. Oui je me sentais pressurisée. Et oui, je ne gagne pas beaucoup. Mais alors quoi c'est une excuse? Suis-je à 10 euros près ? Non. Est-ce que vraiment je dois aller chercher des arguments à la noix genre "oui mais heu il n'a qu'à travailler.... Oui mais heu on ne sait pas ce qu'il va faire de cet argent...". Non. On se ment. On vit dans une société qui normalise le fait de ne pas être dans le cœur.
J'ai eu honte de moi mais je ne suis pas revenue en arrière. Justement parce que j'avais honte j'imagine.
Dans le métro mes yeux tombent sur une affiche sur laquelle une femme a une large frange qui tombe jusque sous ses yeux. Quel aveuglement. Sommes-nous capables de vivre avec cœur? Cela nécessité parfois le courage de défier ses peurs. L'avons-nous?
18h. Arrivée à l'hôtel. La nuit m'a été offerte par une habituée du 47, qui avait réservé une chambre mais ne pouvait plus s'y rendre. Comme ça, généreusement, sans me connaître. Je me dis que c'est ça le monde vers lequel je voudrais tendre, un monde qui n'est plus drivé par la peur de manquer, le besoin de gagner de l'argent, mais par la joie du partage, l'entraide, et la certitude (la foi plutôt) que lorsqu'on donne on reçoit en retour.
19h. Tout cela me fait revenir sur ma question du moment. Comment vivre en étant à sa place ? Comment combiner le besoin d'authenticité, le besoin d'agir pour quelque chose qui soit juste, et la nécessité de "gagner sa vie", de se "vendre" en faisant de la com', du marketing?
J'ai fini par trouver ma réponse. Qui est humblement la mienne. Je ne peux pas. Je ne peux pas agir depuis le cœur quand j'agis aussi à "contrecœur". Si je me force à écrire, à me vendre, à faire une activité qui ne me plaît pas juste pour gagner de l'argent, si je suis fatiguée de me forcer tout le temps, je ne peux pas être dans le cœur. Je ne le suis pas avec moi. Et forcément pas vraiment avec les autres.
Être dans le cœur nécessite le courage d'être soi et de défier la peur qui nous pousse à ne pas l'être.
Ce soir je pense au livre de Corinne Morel Darleux que j'ai lu il y a quelques années : "Plutôt couler en beauté que de flotter sans grâce". Il m'avait beaucoup marquée. L'auteur livre l'histoire vraie d'un navigateur qui, alors qu'il est donné vainqueur du Golden Globe Challenge, renonce à la victoire et abandonne. Ce "refus de parvenir" se voulait comme un cri d'alarme, un refus de jouer le jeu du système et de réussir dans un monde qui détruit la planète et la biodiversité.
A mon très humble niveau je ressens le meme élan. Je refuse de jouer les règles d'un système qui nous pousse à penser à l'argent avant de penser à l'autre et au monde. Qui nous pousse à faire des choix de raison plutôt que du cœur. Qui nous pousse à nous trahir et nous vendre comme des produits de consommation.
Je ne ferai plus jamais de post qui soit drivé par autre chose que l'envie de démonter ce système délétère.
Bref je suis un peu en mode venere ce soir 😁. Mais un mode venere plein d'amour 😊. Unissons nos forces pour faire de l'amour une stratégie (et puis nous pourrons virer le mot "stratégie" et simplement vivre comme des humains).
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